vendredi 12 juin 2015

Allons voir l'Atlantique.

Le dernier week-end de mai, je m’attaquais à un gros morceau. L’idée était de prendre mon vélo et mon maillot Malteni et de diagonaliser jusqu’au Cap Ferret. Mais comme vous vous en doutez ce n’est pas si facile et moi je vais l’apprendre.

Vélo chargé dans la semaine, emmené au boulot en camion. Départ de là-bas normalement, mais une sombre histoire de carte azur, me fera faire quelques kilomètres supplémentaires. Un retour à la maison et un allé-retour à la banque. Ainsi, je ferais le galop d’essai du paquetage sur le chemin de la maison. Celui-ci ne souhaitant pas rester avec moi tombera sur le tarmac. Du moins la sacoche avant, qui est une ébauche. Départ prévu pour 13h décalé à un bon 15h. Mais départ quand même !

Le destrier 

Dés les premiers kilomètres qui m’orientent vers Douai, un doute s’insinue. Celui-ci se nomme le vent. Il est là, il me toise de son torse et surtout me souffle en plein visage avec une certaine force. Il a du coffre le gaillard car il ne me lâchera pas des 740km que j’ai pu parcourir. Après plusieurs heures de route, sa mégère s’invite, plusieurs averses me tomberont sur le coin de la figure, uniquement dans le but de me voir sécher à la chaleur de mon effort. C’est entre 21h et 23h qu’ils s’allieront pour me faire plier.
Il est 23h passées, je suis trempé jusqu’au fondement, sur une départementale à fort passage, rien pour m’abriter sur les bords de route. J’aperçois la lueur d’une ville, c’est Beauvais qui me tend les bras, je fais un dernier effort, et un hôtel m’attire de sa lueur. Ne me voyant pas continuer encore sous cette pluie sur cette route. Je prends le parti de me réchauffer et de faire sécher mes affaires dans une chambre payée les ¾ du budget que j’ai emmené. Ma nuit sera remplie de doutes.
5h le réveil sonne, je bondis du lit, motivé à chasser les doutes et idées grises. J’ai la chance de pouvoir faire ce genre d’aventure, donc Hauts les cœurs ! Je décroche mes affaires, certaines ont à peine séché. J’enlève le PQ dans mes chaussures. J’avale quelques barres et me voila dans l’ascenseur. Une fois le portail de l’hôtel passé, je reprends le chemin du GPS et j’attaque cette longue journée.
Je sais que je ne serai pas à l’heure promise chez Max, mon beau frère, mais je ne relâche pas l’effort pour y arriver au plus tôt.
Mon premier plan était de rouler la nuit de vendredi à samedi et de siester si besoin le samedi. Me voila donc dans l’idée de rouler le samedi et la nuit du samedi au dimanche. Le vent est toujours là mais plus timide, il dort encore le bougre. Je traverse le plateau du Vexin par les petites routes, c’est agréable. J’y croise beaucoup de faune, pour la première fois je vois un renard.
9h, pause déjeuner. Une boulangerie, deux croissants et une tasse de café. Je reprends la route. Certaines départementales me donnent des vertiges de sur-place. Le soleil est présent et met mon moral dans la zone verte. L’aventure continue. Après avoir passé la Seine à Mantes-la-Jolie, j’aperçois les premiers panneaux pour le Mans. Il est bientôt midi et j’ai emmené mes chèques déjeuner. C’est une bonne solution pour ne pas amputer le reste de mon budget. Pas envie de perdre du temps en restauration, j’essaie de trouver une superette qui prendra ma monnaie de singe. Dans une bourgade, ma quête est victorieuse. J’attache mon vélo et je vais faire mes courses. Je reste dans le sas pour manger à l’abri du vent. Je sens des regards lourds mais aussi des bonjours amicaux. Un monsieur assez âgé me salue. C’est « un cyclo ». Il m’a vu passer tout à l’heure mais avec mon léger paquetage, il pensait que je parcourais la rando du coin. Nous nous serrons les mains et je repars.

Un peu de chemin

Le Mans passe, des cumulonimbus se forment un peu au sud. Revoilà la mégère. Je ne veux pas recevoir une nouvelle fois ses crachins au visage. J’accélère pendant une bonne heure et je passe au travers.
Avec ce rythme, je dois pouvoir rallier Royan avant 5h du matin. Le soleil donne, je me ravitaille en eau chez les vivants ou chez les morts. Jamais une parole de trop ni de curiosité, la politesse est de mise semble t il. Une fois le Mans contourné, l’objectif suivant est Saumur et la Loire. Après des kilomètres alternant petites routes communales et immenses départementales droites, venteuses et sans grand intérêt, j’atteindrai la ville de l’Anjou et je passerai la Loire. Le soleil décline. Une gentille famille de fleuristes préparant les derniers bouquets pour la fête des mères me remplira mes bidons.

La Loire

Il est 21h environ. Il me reste plus de 200km avant de rallier Royan. Je commence à accuser un peu de fatigue. Je me sens de rouler le maximum cette nuit, avec l’espoir d’arriver à Royan. Mais mon premier objectif est de tenir jusque minuit pour appeler ma chérie et être le premier à lui souhaiter son anniversaire. Le second est de toucher Niort. En atteignant, le premier objectif j’ai derrière moi de longues lignes droites sans couvert, en plein vent. Le petit coup de fil remet mon moral en selle. Hors à cette heure il est mauvais cavalier et chutera sur le coup de 1h30. Avec une forte douleur provenant de mon tendon d’Achille, j’essaie d’étirer, je m’arrête très souvent et je m’aperçois que je ne suis plus très lucide. D’un commun accord avec mon mental et aux vues de la rectiligne qui m’attends, je cède aux appels lointain de Morphée. Je sors de ma trace et je pars en quête d’une place tranquille hors de vue. Une pâture fraichement fauchée m’accueille. J’y jette couverture de survie et duvet. Morphée, dans sa bienveillance, m’accueille instantanément. Il est passé 1h du matin, nous sommes dimanche. J’ai fait environ 440km en 20h et 600km depuis vendredi.
5h30 le réveil hurle. C’est dur, je suis bien là. Mais il faut se mettre en route. Je refais mon paquetage en restant au chaud dans le sac. Une barre de céréale, de l’eau et je remonte sur le vélo. La douleur n’a pas changé. J’essaie des positions et je finis par pédaler avec le talon ce qui m’oblige à pédaler de coin. Mon fondement n’appréciera guère. Le vent me fait courber l’échine, je suis une ombre. 40km plus loin, à Niort, les habitués d’une boulangerie me le feront comprendre en me chipant la place. Je prends un café, des viennoiseries et de l’ibuprofène. De nouveau les jambes tournent, cette douleur me fait enrager car j’ai encore de l’énergie dans celles-ci.
Après Niort, je sors des grandes départementales pour les petites communales, qui me font penser à autre chose qu’à cette cheville. Et surtout, je suis à l’abri du vent.

Le dernier Pont-Nacelle au dessus de la Charente

Malheureusement, le salaud souhaite m’achever. Il monte la puissance d’un cran. A Rochefort, extenué, je m’arrête, ôte mon casque et le vent s’en empare et fait tomber mon vélo posé sur la table de pique-nique. Le temps de grignoter quelque chose, je repars. Avancer toujours, avancer.
Royan, la voici, la ville promise, il est 13h, je suis un peu perdu sur l’embarcadère du bac pour Verdon-sur-mer. J’ose demander de l’aide à un homme en chasuble. Chance, j’ai une minute pour attraper le bac. Je paie ma place et m’assied dans le bateau au sol, à coté de mon valeureux destrier. Je sors une plaque de chocolat qui aura l’effet d’un premier shoot pour un toxicomane. Mais à l’instant où je souhaite me lever, je manque de tomber. Non pas que le roulis du au camarade Eole soit important mais surtout car ma cheville ne répond que par des signaux de douleurs aigus. Quelques échanges digitaux avec Max qui vient aux nouvelles se solderont par un rendez vous quelque part dans Verdon.

Au revoir Royan

Il manquera 100km au voyage. Mais surtout les 100km qui devaient être les plus jolis sur la Velodyssé. Mais finalement, voir des têtes familières et l’accueil chaleureux me font vite oublier le peu d’orgueil qui sommeille au fond de moi.
Cette fois, j’ai tiré des enseignements encore plus forts et pris conscience de la tache à accomplir. L’envie de repartir est encore plus forte.
Merci à ceux qui me soutiennent.


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